Transcription - Episode 29

Transcription

Le pouvoir de guérison de la fasciathérapie : vaincre la douleur chronique et stimuler la santé cellulaire - Valeria Loro Milan • 29

Caroline : Valéria. Tu es fasciathérapeute.

Valéria : Oui.

Caroline : C’est ça ? C’est comme ça qu’on dit ?

Valéria : Oui.

Caroline : OK. Donc, tu es avec moi aujourd’hui pour parler d’un sujet que… dont… enfin, que je souhaitais aborder sur le podcast depuis très longtemps, que sont les fascias, parce que c’est quelque chose qui est extrêmement intéressant, qui se développe un petit peu plus ces dernières années. Il y a un magnifique reportage sur Arte qui explique très bien ce que c’est. Et ce n’est pas encore très connu, je trouve en tout cas. Et donc moi je suis ravie d’être avec toi pour discuter de tout ça aujourd’hui. Donc tu vas te présenter et ensuite nous expliquer un peu plus qu’est-ce que c’est les fascias, le monde des fascias, comment ça marche, à quoi ça sert et comment ça peut nous aider à être en meilleure santé.

Valéria : Super ! Merci Caroline. Je suis ravie aussi d’être là et de pouvoir partager un petit peu mon parcours, et ma passion aussi autour de, voilà, de ce tissu mystérieux dont on découvre les bienfaits encore. Et, je commence par me présenter peut-être.

Caroline : Complètement.

Valéria : Voilà, un petit peu le parcours, comment j’ai connu la fasciathérapie. Donc, je l’ai connu en 2005 au Brésil, lorsque j’habitais à Rio de Janeiro. J’avais des problèmes de dos, donc j’ai deux petites protrusions au niveau des lombaires. Et…

Caroline : Qu’est-ce que c’est ?

Valéria : C’est une pré-hernie en fait.

Caroline : OK.

Valéria : Mais bon, les douleurs peuvent être égales à celles d’une hernie.

Caroline : OK.

Valéria : Voilà. C’est encore un petit peu contenu. Et j’avais également des problèmes de genoux. Ce qui avait fait que j’avais fait beaucoup de danse classique jusqu’à l’âge de dix-huit ans, j’avais obtenu un diplôme aussi d’enseignants de danse classique. Et à dix-huit ans, j’ai arrêté tout. J’étais ensuite derrière un ordinateur, et j’ai, voilà, j’ai changé un petit peu de voie. J’avais le désir effectivement, jeune, de travailler avec le corps, que ce soit la danse ou je ne savais pas trop. Mais je me suis retrouvée derrière un ordinateur et je suis devenu designer graphique.

Caroline : OK.

Valéria : Ce qui était super. Mais j’avais tout le temps des douleurs de dos jusqu’à donc trente ans, vingt-neuf ans. Et quand j’ai… donc j’avais beaucoup cherché pendant tout… des dix-huit à mes vingt-neuf ans, j’ai cherché beaucoup de techniques qui pouvaient m’aider à soulager ma posture, parce que même assise derrière un ordinateur, tu peux imaginer que ce n’est pas forcément la solution pour avoir un dos en santé en fait et pour se sentir bien, donc ce n’était pas la solution. Mais ça revenait ce problème de genoux et de dos. Et puis en 2005, je connais un professeur, professeur Armand Angibaud, qui est donc un dinosaure de la fasciathérapie, qui est toujours en vie, il a quatre-vingt-un ans, je pense oui, quatre-vingt-un, et qui par une séance me fait comprendre en fait comment s’était installée la problématique du genou qui était reliée au dos. Et donc je vis un soulagement incroyable au bout d’une séance, qui évidemment ne dure pas. Et parce que là, après, je comprends, et je me suis mise vraiment dans une démarche de conscience du corps, mais disons que de revivre cette sensation de liberté et de soulagement à l’intérieur du corps, ne serait-ce qu’une journée, au bout de tant d’années de douleurs, voilà, c’était absolument incroyable. Ce qui a fait qu’à partir de cette séance là, j’ai décidé à l’intérieur de moi que j’allais prendre cette voie en fait, que je ne savais pas qu’est-ce que j’allais faire, mais que je voulais rentrer dans cet univers, d’abord pour me soigner et ensuite pour partager en fait cette expérience que je trouve… que je trouvais absolument incroyable. Donc je me suis engagée dans la formation en fasciathérapie, à côté du professeur Angibaud. Et c’était une très belle expérience pour moi puisque nous avons pu, et aussi j’étais à côté de lui, dans la cocréation de l’école de fasciathérapie au Brésil.

Caroline : Waouh.

Valéria : Voilà. Et là aussi, mon parcours de designer graphique m’a servi puisque j’ai pu l’épauler au niveau, voilà, de tout ce que je pouvais au niveau de l’identité visuelle, et cetera, même si on a à travers d’autres personnes qui étaient des designers graphiques. Et en tout cas, j’ai pu voir, voilà, un petit peu utilisé mes savoir-faire au niveau du design graphique. Et puis à côté de lui donc j’ai suivi la formation. Et j’ai pu vraiment approfondir cette question, voilà, de comment en fait, la fasciathérapie, dans un premier temps, soulageait des problèmes mécaniques, donc trouvait une solution à quelque chose qui vraiment me dérangeait au quotidien ; et puis découvrir un univers absolument incroyable qui est celui de l’intériorité du corps en fait, de cette vitalité que l’on perçoit et qui est à l’intérieur du corps. Cette fasciathérapie, donc que j’ai pu expérimentée, est de l’école de Danis Bois, et qui est basée, donc parce qu’il y a plusieurs… il y a plusieurs écoles…

Caroline : D’accord.

Valéria :… plusieurs disciplines en fait, qui s’intéressent aux fascias, mais disons que ce qui est spécifique chez la méthode Danis Bois, c’est le mouvement interne, c’est-à-dire que par les fascias, on peut percevoir un mouvement lent qui anime la matière du corps, et c’est ce mouvement-là qui est le principe actif, c’est ce mouvement-là qui va aller réguler le corps, rentrer dans les résistances, libérer une vertèbre, voilà, ce que le fasciathérapeute fait, et de percevoir ce mouvement qui anime la matière du corps, et de l’inviter à rentrer dans la profondeur, et aussi dans la distance, donc des pieds à la tête, on va dire un peu. Voilà. Donc, c’est la spécificité de cette méthode. Et donc, ce mouvement qui est perçu aussi, qui peut être prolongé aussi dans le mouvement gestuel. Donc on a plusieurs façons, c’est ce dont on parlait tout à l’heure, de se prendre en main un petit peu dans son processus et disant « OK, je suis soulagée. J’ai reçu une séance super, mais maintenant si je veux prolonger, aller au-delà et vraiment m’approprier du bienfait, il va falloir que je mette du mien et que j’apprenne en fait à rester en lien avec cette partie de nous qui nous, voilà, de vitalité, de cohérence physiologique, d’intériorité, etc. »

Caroline : C’est impressionnant. Et donc ensuite, tu t’es formée et tu as décidé d’exercer. C’est combien de temps la formation pour être fasciathérapeute ?

Valéria : Alors, au Brésil, nous avons fait une formation sur trois ans. Voilà, parce que mon professeur il voyageait pas mal donc il faisait des allers-retours entre la France. Ensuite, j’ai suivi aussi une formation en France quand je suis revenu du Brésil, je suis arrivée en France à nouveau en 2012. Donc voilà, j’ai resuivi une formation au centre de formation sur Paris. Et en fait, on a deux… je ne sais pas si c’est déjà bien qu’on parle de ça ou peut-être des fascias avant ?

Caroline : Je ne sais pas là où tu vas donc…

Valéria : Non parce que c’est, comme c’est un réseau…

Caroline : Ouais, ouais.

Valéria :… je risque de…

Caroline : Non, mais ce n’est pas grave, on va revenir sur les fascias après, ne t’inquiète pas. Ça, je m’en charge.

Valéria : Parce qu’en fait, nous avons… donc la fasciathérapie, comme je le disais tout à l’heure, est cette thérapie manuelle et gestuelle, qui est basée sur l’écoute du mouvement interne, et nous avons aussi une deuxième méthode que Danis Bois a créée aussi, qui s’appelle la pédagogie perceptive ; puisqu’il s’est rendu compte au fur et à mesure, donc la fasciathérapie à peu près des années 80 ou 82, à peu près, et Danis Bois s’est rendu compte que lorsqu’un problème mécanique était résolu suite à ce mouvement interne qui allait dialoguer à l’intérieur du corps, dans des fascias, pour libérer, voilà, prendre soin du problème, il y avait aussi une répercussion au niveau émotionnel et psychique.

Caroline : D’accord.

Valéria : Et donc, comment prendre en main aussi cette partie de la personne ? Puisque voilà, toute résistance qui se libère est aussi, voilà, un trésor, est aussi une information qui vient du corps et qui peut, voilà, donc c’est… Donc la deuxième méthode qu’il a créée, c’est la pédagogie perceptive qui est, qui aussi traite le corps, mais de façon moins, disons, la fasciathérapie est plus sur la mécanique du corps, donc c’est le traitement voilà des hernies, des problèmes voilà, vraiment mécaniques, mais avec la pédagogie perceptive, nous pouvons rentrer dans la dimension, disons, plus, un peu plus globale, et transformer ces informations qui viennent du corps, et retrouver une unité émotionnelle et psychique. En tout cas, prendre en compte aussi cette dimension.

Caroline : OK. Donc c’est vraiment complet en fait.

Valéria : C’est… oui, c’est complet. C’est complet parce qu’à cela on ajoute, donc on allie à la thérapie manuelle, et on ajoute aussi le mouvement, le mouvement gestuel, qui a un prolongement de la thérapie manuelle, mais dans le mouvement.

Caroline : D’accord.

Valéria : Et ce qui va permettre de passer à l’action et de pouvoir vivre ce mouvement, mais au niveau de l’amplitude articulaire, et de l’habiter dans un geste vraiment, voilà, prolongé dans l’espace. Et nous avons un troisième outil qui est l’introspection, qui est comme une méditation, où on est… qui à la base est né pour former les thérapeutes, pour que le thérapeute puisse avoir ses récepteurs bien au clair, voilà, au niveau de pouvoir soigner, avoir un traitement, voilà, adéquat, et qui est tout à fait nécessaire aussi pour la personne qui veut aller un peu plus loin. Donc en introspection, on ferme les yeux, on observe ce qui se passe, et on peut percevoir beaucoup de mouvements lorsqu’on est dans le silence et dans l’immobilité.

Caroline : OK. Et donc là c’est du mouvement interne, toujours, ce que tu perçois ?

Valéria : On perçoit cette animation interne qui est indépendante de la volonté, donc, ce n’est… qui est indépendant, ce n’est pas le mouvement du cœur, ce n’est pas la respiration, ce n’est pas le flux sanguin, c’est vraiment un mouvement dont Danis Bois s’est aperçu. C’est cependant, c’est vraiment une expérience qu’il a eue pendant qu’il méditait en fait ; à un moment donné, il a senti que la matière de son corps était animée par un mouvement. Et lorsqu’il a… il est physiothérapeute, et voilà, le créateur de la fasciathérapie, lorsqu’il… le lendemain d’avoir eu cette expérience qu’il appelle une expérience fondatrice, parce que c’était quelque chose d’incroyable, il a glissé dans son geste lors d’un traitement, il a glissé cette conscience en fait du mouvement, et il a commencé, là c’était le début de la création de la méthode. En voyant que, comment en fait le corps réagissait, est-ce que ce mouvement était reconnu à l’intérieur de la matière, et donc une grande efficacité, entre autres, dans la… Et là après, il a mis en place tous les processus, donc c’est des protocoles qui sont… où vraiment on apprend à faire une lecture du tonus. Donc c’est un sens, il appelle ça le septième sens, c’est le sens du mouvement, qui a un sens qui est éducable.

Caroline : OK.

Valéria : Et on apprend à lire le tonus, comment le tonus se comporte, comment on sait lorsque la résistance elle… on n’y rentre pas comme ça de face, on y rentre, par, voilà, on cherche une voie d’entrée dans la résistance du corps, il y a un dialogue qui se fait, et tout ça, c’est… on peut l’apprendre. Tout ça, c’est on peut l’apprendre, ce n’est pas une faculté de magicien.

Caroline : Et quand il y a des personnes qui viennent te voir, donc pour un traitement, je ne sais pas comment on dit, en fasciathérapie, est-ce que du coup… donc tu les… il y a la thérapie manuelle, ça j’ai bien compris, et après tu les accompagnes à avoir un mouvement qui leur va bien pour gagner en amplitude et pour se sentir mieux donc, tu leur montres des mouvements qu’il faudrait peut-être faire ou répéter au quotidien ?

Valéria : Oui. Exactement. Donc au début, ça dépend des… mais normalement au début, on fait peut-être une ou deux séances seulement en thérapie manuelle, puisque vraiment le… pour que, pardon, pour que vraiment la matière elle soit imprégnée de mouvement, par le fait d’être "passif", parce que c’est… on n’est pas du tout passif puisque nous, nos récepteurs et notre perception sommes très éveillés, mais disons, on est immobile, allongé sur une table, et c’est vraiment l’occasion où on peut rentrer dans la profondeur du corps et le libérer. Donc après, au bout d’une ou deux séances, quand la matière elle est bien, disons, malléable, des fois ça prend un peu plus parce qu’il y a des identités qui sont un peu plus, voilà, chacun a son histoire, donc on peut rentrer dans un mouvement qui a le prolongement de ce touché, de cette thérapie manuelle.

Caroline : D’accord.

Valéria : Donc ce sont des mouvements lents, de glissement, où on arrive à percevoir qu’est-ce qui se passe dans le micro-jeu articulaire, on arrive à percevoir en fait tout, le corps, petit à petit, et on est dans une globalité du corps. Donc bien sûr, on va traiter, si en thérapie manuelle on s’est aperçu, on sait qu’il y a un problème lombaire, un problème, il y a ça, mais on va réintégrer tout ça dans le circuit, dans l’ensemble du corps. Donc c’est des exercices spécifiques pour répondre à une problématique particulière, mais bien sûr, on est toujours dans l’intelligence et dans la globalité d’un corps qui fonctionne dans son ensemble. On ne va pas appuyer sur le symptôme, sur le problème. Bien sûr, on va le travailler, voilà, un moment, mais ce n’est pas le… ça ne va pas être… les soixante minutes de la séance ne vont pas être sur ce problème-là, c’est justement, c’est l’ensemble du corps, et les ancrages justement du Fascia. Parce que le fascia, on peut peut-être…

Caroline : C’est ce que j’allais dire. Est-ce que tu peux s’il te plaît du coup, rentrer dans le détail du fascia ? Et avant, je fais juste une petite pause, pour expliquer aux auditeurs qu’en fait donc Valéria est en train de faire des mouvements quand elle parle des mouvements, qui, moi, me font penser beaucoup à des mouvements de Tai-chi parce qu’en fait, c’est très doux, très élancé, on sent qu’il y a de la force dans les doigts, jusqu’au bout des doigts, mais voilà, pour vous donner un petit peu l’image du mouvement en tout cas dont on parle. On est plus là-dedans, dans quelque chose un peu qui ressemble à du Tai-chi. Donc, je t’en prie, parle-nous des fascias à proprement parler. Qu’est-ce que c’est un fascia ?

Valéria : Et après, je te dirai une petite chose sur le Tai-chi aussi. C’est très intéressant quand tu les…

Caroline : OK.

Valéria : Alors, le fascia, le fascia a été longtemps, on a… on a pensé qu’il s’agissait juste des enveloppes du corps. On a cette idée de l’enveloppe, on lit un peu encore de partout. Et en fait c’est bien dommage parce que c’est une, ce ne sont pas que des enveloppes en fait. C’est bien au-delà. Il s’agit d’un système en fait qui est… On peut l’appeler un peu le système des systèmes, puisque c’est… le fascia, il va, il constitue les os. C’est comme un seul et même tissu qui part de l’intérieur des os, donc il ressort, il crée, il devient le périoste donc qui est, c’est la peau des os, il se prolonge en muscles, des muscles, il rentre dans les fibres musculaires, il ressort, ça devient, il s’épaissit, devient un tendon, un ligament, nanana, jusqu’à la peau en fait. C’est vraiment un… c’est vraiment quelque chose… on a souvent étudié l’anatomie par segment, on étudie le squelette.

Caroline : Oui c’est vrai qu’on a cette image en coupe, entre guillemets, dans les livres, en S.V.T., ça remonte, mais, ou même dans les squelettes qu’on peut voir parfois chez le médecin, de voir un corps en fait découper avec il y a l’os, le truc, le machin, jusqu’à la peau, l’épiderme, le derme et la peau quoi.

Valéria : C’est exactement. C’était une façon d’apprendre l’anatomie. Mais le fascia, puisque c’est, ce tissu conjonctif, n’était pas considéré, puisqu’il pénètre toutes les structures, il n’est pas… normalement, hop on disséquait on prenait le cœur et puis on jetait ce truc gélatineux qui était le fascia en fait. Donc, aujourd’hui, on a beaucoup de chercheurs qui s’intéressent aux fascias. On a beaucoup de, on a un livre dont je parlerai tout à l’heure, de Nadine Quéré, qui est vraiment, il s’appelle « Soigner son corps avec les fascias ». Nadine Quéré est l’autrice de ce livre, elle fait vraiment une… elle montre un tout petit peu l’horizon des fascias avec toutes les références, c’est très, très intéressant. Et aujourd’hui on a des études. Par exemple, on a des études sur l’os, comme on disait tout à l’heure, donc l’os, le tissu osseux, il y a du fascia à l’intérieur du tissu, il n’y a aucune… en fait, il n’y a aucune discontinuité.

Caroline : C’est pour ça… Je me permets une parenthèse du coup, parce que juste avant d’enregistrer, on a parlé de mon problème d’épaule. Donc c’est pour ça que tu me disais en fait que probablement ça pouvait aussi beaucoup m’aider parce que donc, moi je suis hyperlaxe, je casse mes os, mais je ne casse rien d’autre. Et donc c’est parce que ça va de l’os jusqu’à l’extérieur. Donc si je comprends bien, ça enveloppe vraiment tout.

Valéria : C’est ça.

Caroline : OK.

Valéria : Et dans ce nouveau système, en fait, là j’ai amené ce hochet.

Caroline : Vas-y, vas-y. Je filme et je mettrai les éléments en ligne. Voilà, c’est bon.

Valéria : En fait, ce système que l’on appelle tensegrale, donc tensegrale, c’est le jeu de tension. C’est un jeu de tension, en fait.

Caroline : OK.

Valéria : Si on… C’est un nouveau modèle anatomique possible, qui est en train de se mettre en place. Ce modèle s’appelle donc Biotensegrale. Si on imagine que ces segments lents sont les os, et que ceux-là sont les fascias, même si on sait que les fascias rentrent aussi dans les os, on peut voir qu’en fait les os restent suspendus à la lumière du système. Ce n’est plus ce modèle…

Caroline : Je vois.

Valéria :… où c’est la charpente qui porte, et après tout le reste se construit en couches. En fait, dans ce système tensegrale, tout est… ce qui va être important, c’est les appuis. Donc pour que la structure il y a un volume, il faut qu’on ait un appui. Et comment on le voit bien ? C’est que dès qu’il y a une, il y a une modification, donc une pression, où tu vois une traction dans une direction, et c’est tout le corps, c’est toute la structure qui répond. Tu vois ? Et du coup, au lieu qu’il y ait, tu vois, là il y a le genou qui fait un peu bande à part parce qu’il galère, il a mal, et cetera, on va le remettre dans sa globalité pour que cette question-là elle soit gérée par la globalité du corps, donc les appuis. Donc qu’est-ce que j’ai comme appui ? Je suis debout j’ai les pieds, je suis assis j’ai les ischions, tu vois ?

Caroline : OK.

Valéria : Et ça c’est vraiment un nouveau modèle qui va, tu parlais tout à l’heure des extrémités aussi des mains, c’est très important parce que souvent on a, voilà, quand on parlait des activités sportives, des fois on pense que le gainage est plus important du coup je vais gainer, mais je vais laisser le… Donc c’est important de le vivre jusqu’au bout des doigts pour que toute la structure elle soit présente, et quand toute la structure est présente, vraiment c’est magnifique, parce que le corps, on est en contact avec la force de régulation du corps, qui se soigne, et simplement on remet sa fonctionnalité.

Caroline : OK.

Valéria : On lui redonne le moyen de fonctionner. Il fonctionne, mais il faut, voilà, on n’est pas… le corps n’est pas fait pour rester douze heures assis face à un ordinateur, dans une mauvaise posture. Voilà, c’est, c’est… Mais on peut très bien, bien sûr, avoir un travail où on est assis longtemps, si on est en conscience et si on fait un travail. Voilà. Il faut… c’est, c’est, voilà, c’est un changement, donc on apprend, voilà, il faut le… il faut un petit peu l’imaginer, le comprendre un petit peu au niveau du, tu vois, cognitivement, et après le vivre en séance donc pour que vraiment on puisse sentir cette unité, cette unité du corps.

Caroline : Et c’est quelque chose que tu expliques aux personnes qui viennent te voir avant de débuter une séance, pour qu’elles essayent d’être en conscience plus ?

Valéria : Oui, bien sûr, je l’explique. Et c’est important, ça prend, ça prend du temps. Mais avec… en répétant, évidemment ça rentre, c’était la même chose pour moi aussi. Au début, je voyais que ça marche, que les séances marchaient bien, mais c’était avant de vraiment intégrer. C’est un travail constant en fait. Il n’y a pas de limite. On peut aller de plus en plus loin dans cette histoire de la conscience du corps, en fait. Donc, de le montrer, c’est très important. Et j’associe d’ailleurs aussi le Pilate dans mes cours. Enfin, dans, j’ai… je suis en train de créer aussi une méthode qui s’appelle Fascia Dynamic, et qui vient, disons, qui associe la fasciathérapie, donc la thérapie manuelle, la gestuelle, la prospection, avec aussi le Pilate. Donc, comment je peux passer de quelque chose qui est… dans la fasciathérapie, on est dans la sensorialité, donc on est dans percevoir le corps et percevoir ce mouvement qui habite le corps ; et dans le Pilate, on est dans le « faire », donc on est dans quelque chose de musculaire, de volontaire, et cetera. Donc, comment joindre ces deux choses-là ? Puisque c’est… mais c’est possible puisque le corps, nous avons des muscles, nous avons… tout est, tout peut être intégré en fait, toutes les parties de l’être peuvent être intégrées dans un mouvement, dans une personne, et ce que j’essaie en cours de Pilate, j’utilise beaucoup des images, par exemple, j’ai aussi ce… j’aime beaucoup ce petit personnage.

Caroline : C’est Batman.

Valéria : Oui. Ça pourrait être Batgirl.

Caroline : C’est Catwoman, allez.

Valéria : Ouais, voilà. Et du coup, c’est…

Caroline : Ah oui ! C’est en fait un bonhomme élastique, à peu de choses près.

Valéria : On va dire que, c’est tout est… on parlait des os, on parlait de tout, tout le corps devient cette structure élastique qui s’adapte, qui peut… qui se défend, qui revient dans sa forme originelle, qui, voilà. Tout… où tout est pris en compte en fait. Et je cherche aussi dans, du coup dans le Pilate, de faire ce glissement vers le musculaire, ce qui n’est pas toujours facile puisque nous, souvent, nous avons, voilà, des idées sur ce que ça doit être le Pilate, le corps, le body shaper, et cetera. Mais on arrive à un gain lorsqu’on arrive à rentrer dans cette profondeur, on gagne en mettant les choses en réseau justement.

Caroline : Quand tu dis on gagne, c’est quoi ? Tu gagnes en posture ? Tu gagnes en facilité de…

Valéria : Puisqu’en fait c’est la question de la conscience du corps vraiment, puisque dans les fascias nous avons aussi plein de récepteurs. C’est comme des petites antennes qui sont partout dans le corps, dans la peau. Et ces antennes, elles nous informent sur plein de choses, sur la proprioception, donc comment, où est-ce que je suis placé dans l’espace, qui est également, la proprioception c’est aussi la perception de soi, de son intériorité, et donc comment je peux aller dans un geste musculaire, mais sans oublier cette partie, cette intériorité. Voilà, c’est ça aussi…

Caroline : Ne pas être en force quoi.

Valéria : On peut être en force, et c’est ça aussi, on passe de la force à la puissance.

Caroline : OK.

Valéria : Parce que dans la force, on est dans, disons, dans quelque chose de volontaire, mais on est, il y a une partie qui est coupée, et quand on est dans la puissance…

Caroline : Oui, voilà, c’est ça oui, c’est plus la nuance force versus puissance, oui. OK. OK.

Valéria : En tout cas, d’essayer d’y aller avec cette partie de soi qui est interne en fait, qui est invisible et qui ne dépend pas de notre volonté. Donc c’est un petit peu, dans les cours j’essaie de jouer de… un petit peu pour mettre un pinceau, un coup de pinceau de fasciathérapie, un coup de pinceau de Pilate, voilà, quelques principes des fascias dans le Pilate.

Caroline : OK. Et donc on a un peu dévié, mais on était donc sur le fascia et sur le fait que ce soit cette chose qui enveloppe un petit peu tout l’intérieur de notre corps. Et qu’est-ce qu’on a découvert du coup avec les fascias ?

Valéria : Alors, on a découvert que les fascias ont beaucoup de fonctions puisqu’il s’agit d’un système qui traverse tous les systèmes. Nous avons, tu parlais tout à l’heure de l’anatomie, de comment on a étudié l’anatomie en disséquant en fait, donc en disséquant, nous ne pouvions pas avoir accès à cette structure qui est traversant. Et il y a un chirurgien de la main qui aujourd’hui est à la retraite, c’est le docteur Guimberteau, qui a eu l’idée de mettre des endoscopes sous la peau.

Caroline : C’est quoi un endoscope ?

Valéria : C’est des petites caméras.

Caroline : D’accord.

Valéria : Voilà, sous la peau, pendant sa chirurgie de main, et de voir qu’est-ce qui se passe en fait dans le corps. Et c’est très intéressant parce que nous pouvons voir comment le collagène donc, les fascias c’est du collagène, les filets de collagène, c’est une structure en fait, qui est constamment en train de s’adapter.

Caroline : Oui.

Valéria : Ces filets de collagène qui constituent les fascias, ils sont, ils se divisent, ils reviennent. C’est un univers totalement en un mouvement, qui apparemment complètement chaotique. Mais en fait il y a une… et c’est ça ce qui se passe. C’est exactement ça. Ça, ça pourrait être les fibres de collagène, donc la même structure tensegrale dont on a parlé tout à l’heure. Et le fait… On a des études aussi. Donc on a Guimberteau avec ses… ça s’appelle Endovivo le site où il y a le recueil de toutes ses vidéos qui sont très intéressantes. Et puis on a d’autres chercheurs. On a Ingber qui fait, qui montre un lien entre le fascia et la cellule. Ça aussi c’est très profond puisque dans la cellule, un squelette qui s’appelle le cytosquelette, et le fascia, il y a un fascia qui est, via collagène, qui est directement lié au cytosquelette. Donc lorsque le fascia il est bien dans sa peau, il est, disons, animé par un mouvement lent, tout se passe bien, il est en train d’informer la cellule que tout va bien, il n’y a pas de souci, donc c’est une manière de vraiment aller, on parlait de la prévention tout à l’heure, d’aller réharmoniser, remettre vraiment de la santé au niveau cellulaire aussi.

Caroline : OK.

Valéria : Voilà. Donc ça, c’est une, c’est quand même très profond, parce que là on le voit, on le voit dans les… on voit des photos du cytosquelette. C’est le professeur Ingber tu vois ce, qui est Américain, qui a fait un article aussi The Architecture of life paru dans Scientific American en 98. Donc ça fait un moment qu’il est penché sur le sujet. Et, voilà. Donc ça, c’est quand même impressionnant. Dès qu’on a… dès qu’on réalise un mouvement, on est dans le corps de la cellule en fait.

Caroline : Et est-ce que tu as des exemples de… Bon, enfin, on va peut-être terminer d’abord sur toutes les propriétés du fascia. Non, non, mais c’est hyper intéressant donc, j’aimerais bien ensuite que tu nous parles de certains exemples de personnes, tu vois, que tu as pu accompagner, ou des changements qu’il a pu y avoir du fait d’avoir travaillé ses fascias, mais d’abord on va revenir, enfin, si tu veux bien, aux propriétés, donc de qu’est-ce que les fascias nous apportent ? Donc on…

Valéria : Sur les fonctions.

Caroline : Ouais, exactement.

Valéria : OK. Alors, les propriétés donc. Les fascias, je continue un tout petit peu sur les fonctions parce qu’en te parlant des fonctions, on peut comprendre en fait ce qu’un geste qui s’adresse aux fascias peut provoquer.

Caroline : OK. OK. Vas-y.

Valéria : Donc nous avons trois familles principales de fascias. Donc il y a une famille qui s’occupe, enfin, qui s’intéresse aux os, la peau et les muscles. On a une autre, un autre fascia qui s’appelle dure-mérien, qui est plus, qui enveloppe, tu vois le cerveau avec la moelle épinière. Je t’ai amené des petites, des petits…

Caroline : Trop génial.

Valéria : Tu vois ? Voilà, c’est simplifier, mais tu vois ça fait une… Donc le peau-muscle-os, c’est tout le système locomoteur donc du mouvement. Le dure-mèrien c’est le cerveau et la moelle épinière. Au niveau, tu vois, c’est un petit peu le fascia du stress et de la rumination. Donc tu vois quand on a… c’est du stress et…

Caroline : En fait je rigole, je suis désolée, mais je rigole parce qu’en fait, je suis assez stressée en ce moment, et hier j’ai eu un massage de la tête, mais ça m’a fait un bien, mais de fou, et en fait ça m’a détendu tout le corps, mais vraiment tout. Donc en fait, ça me fait bizarre et ça me fait drôle qu’on en parle aujourd’hui. Parce que vraiment, j’ai eu tu sais ce sentiment de détente profond que… franchement, c’était quoi ? Cinq-dix minutes ? Même pas. Juste sur ma tête. Mais j’ai eu l’impression que ça avait duré une heure en fait à tel point ça m’avait fait du bien. Donc voilà, ça me fait rire.

Valéria : Tu as très bonne mine en tout cas. Ça a bien marché.

Caroline : Merci. OK.

Valéria : Donc, ce fascia, tu vois bien que quand tu as… on peut avoir un stress, le fascia il se crispe. Donc c’est un tissu qui est très sensible. Donc, il se crispe, et en se crispant, l’organe qui est en dessous aussi il n’a plu beaucoup de volume, si on en revient à cette histoire du volume.

Caroline : OK.

Valéria : Donc toutes les fonctions qui sont en dessous vont être limitées par cette crispation. Donc on peut avoir cette idée de casque dans la tête, tu vois, quelque chose qui tire. Et le troisième fascia, la troisième famille, c’est l’axial profond, donc c’est tout ce qui enveloppe et compartimentalise les organes.

Caroline : OK.

Valéria :Ce n’est pas juste l’enveloppe, mais il rentre. Donc c’est aussi, donc tu vois, pharynx, larynx, le cœur, les poumons, tout ce qui est territoire… les organes tu vois, et le périnée. Et c’est, la famille des émotions. Tu vois ?

Caroline : OK.

Valéria : Hop, j’ai le ventre noué, j’ai un nœud à la gorge, je peux avoir aussi le casque de tout à l’heure, et je peux avoir un problème locomoteur. Si on rejoint, voilà, tous les… on peut tout avoir. Et c’est pour ça aussi qu’il est difficile de séparer les choses, comme on disait tout à l’heure, puisque c’est… tout ça, C’est lié.

Caroline : Alors je mettrai le dessin, puisque je vois donc c’est le site de Nadine Quéré dont tu parlais et tu parlais de son livre. Je pense que c’est accessible du coup en ligne. Ou en tout cas je mettrai, par un moyen ou un autre, soit un lien vers le site avec les éléments là dont on vient de parler, soit une photocopie de ce que j’ai là sous les yeux en tout cas, pour que si ça vous intéresse, vous puissiez aller le voir.

Valéria : Très bien. Très bonne idée. Super.

Caroline : Oui, donc reprenons sur ces trois différents…

Valéria : Donc, il y a une autre… donc tu vois un tout petit peu la complexité, en même temps c’est simple, et en même temps c’est complexe, puisque nous sommes vraiment dans une fonction de réseau. Tu vois ? C’est l’endroit où tout le corps, où en fait tous ces systèmes se rejoignent puisque, nous avons parlé des os, des muscles aussi donc, tu vois des fibres qui rentrent dans le muscle, qui se prolongent, qui deviennent tendons, qui… c’est un seul et même tissu, donc il englobe le système locomoteur. Également, tu vois le système circulatoire puisque les vaisseaux aussi sont enveloppés, tu vois par des fascias, le troisième, tu vois, la membrane. Donc tu imagines aussi que si le fascia est crispé, je suis stressée, hop le flux sanguin, il y a une turbulence au niveau du sang qui fait qu’aussi, tu vois, au niveau circulatoire, tout va fonctionner de manière moins, voilà, moins efficace. Alors il y a quelque chose qui est… Donc il y a ça. Qu’est-ce que je pourrais dire de plus ? Déjà, c’est au niveau de la mécanique. On a… On a… Ce qui est intéressant aussi, c’est au niveau de la perception du corps. Donc ce qu’on parlait tout à l’heure. Les fascias, c’est comme plein de petits récepteurs donc qui nous informent, et c’est vraiment une voie de passage très, très riche pour, pour la conscience du corps, pour comprendre qu’est-ce qui se passe et pour pouvoir aller plus loin dans la perception de soi et de la, voilà, de son propre mouvement, de sa posture. Et, pour ne rien oublier, je regarde parce que, regarde, il y a toujours Nadine, elle nous a fait, voilà, sur la fonction des fascias, donc on a effectivement la globalité, l’adaptation, le système immunitaire. Voilà, je n’ai pas parlé, quand même ça, c’est important parce qu’on dit le fascia c’est un tissu conjonctif. Donc conjonctif, ça veut dire de conjonction, quelque chose qui fait, qui… en anglais connective…

Caroline : Qui lie.

Valéria : Voilà.

Caroline : Qui relie.

Valéria : Qui relie, exactement. Et il est formé par des fibres, tu vois, c’est fibro-élastique, dans le fibro il y a le collagène…

Caroline : Ouais, c’est ce dont tu parlais tout à l’heure.

Valéria : Le collagène, c’est ce qui fait la colle dans le corps et ce qui, voilà, et c’est élastique, donc il y a cette capacité de… et la nécessité de revenir à sa forme originelle. Donc c’est aussi une… le fascia, il va aussi prendre soin de s’adapter, tu vois. Ce qui est intéressant, c’est qu’il est aussi, dans le fascia il y a aussi à ce qu’on appelle le pré-mouvement, le corps il se prépare avant le geste, tu vois. Avant de chercher mon verre d’eau, mon corps, il se prépare parce qu’il sait et c’est là… après j’ai mon intention, je vais aller prendre mon… et de la même forme, lorsque je vais avoir un accident de voiture, je sais que ce n’est pas un exemple super, mais il rend bien l’idée, juste avant que la… avant même que la voiture et le coup, les fascias se crispent pour protéger le corps. Donc tu vois, il y a une fonction de pré-mouvement. Et justement, le fait de se crisper va permettre aux organes de se protéger. Tu vois ? Sauf qu’après voilà, normalement, dans un stress qui… si le stress il dépasse un niveau d’adaptation, la crispation elle peut rester, il peut rester même vingt ans. J’ai déjà eu un patient qui avait eu plusieurs accidents de moto, et qui même des années avant, peut-être une vingtaine d’années avant, il a senti vraiment le relâchement de ses fascias du ventre, de l’abdomen et qui était absolument incroyable. Ils étaient restés dans une…

Caroline : Dans une tension permanente.

Valéria : Dans une tension qui est donc liée à un trauma. Et donc tout ça, c’est les mémoires, voilà, le corps, il n’oublie rien. Tout reste engrammer dans le corps, et donc c’est une manière de le libérer.

Caroline : Ce que je trouve fascinant dans ce que tu racontes, c’est que j’ai l’impression que, on va dire, les médecins, certains, et la science, est en train de mettre un mot, est en train de découvrir des mécanismes du corps qu’on n’arrivait pas forcément à expliquer, qu’on n’arrivait pas forcément à comprendre. Parce que justement, on avait ce système de couches et bon on regardait de manière assez, voilà, comment dire, très segmenter, les choses. Mais tu vois, tout ce dont tu parles sur la perception, sur les chaussures, sur les petits connecteurs, et cetera, et cetera, en fait, j’ai le sentiment qu’on arrive à relier un petit peu un gros côté scientifique de « le corps, ça fonctionne comme ci, comme ça, c’est comme ça », et plus des choses on va dire : un peu perchées, qu’on pouvait avoir avant. Donc je trouve ça extrêmement intéressant de se dire, comme si on avait ouvert la boîte de Pandore un peu tu vois, pour expliquer l’intérieur du corps, l’extérieur du corps, ce qu’on ressent, ce qu’on vit et puis ce qui se passe à l’intérieur de nous quoi.

Valéria : Bien sûr. Et c’est très intéressant ce qui se passe parce que, justement, les chercheurs sont en train de se, voilà, de plonger. Nous avons aussi une chercheuse italienne qui s’appelle Carla Stecco, voilà, qui est dans la dissection, elle regarde la continuité de comment, voilà, ce tissu, il est continu ? Où est-ce qu’il termine ? Voilà, quelque part, il ne se termine pas, enfin, c’est compliqué, c’est simple et complexe à la fois. On peut aussi passer des heures à le dissocier, à se dire, par exemple par rapport aux chaînes musculaires, des fois on… il y a aussi cette école qui parle des chaînes musculaires, les chaînes antérieures, postérieures, mais quelque part, on pourrait aussi dire qu’il n’y a pas de chaîne, parce que c’est… si c’est… il y a la règle de la globalité, puisque nous ne sommes pas des machines donc je peux… si je suis, si je soulève mon bras en avant, mon dos aussi il est concerné. Donc quelque part, on sépare les choses pour les étudier, parce que sinon, c’est vrai, on ne pourrait rien étudier, quelque part.

Valéria : Mais maintenant, c’est vrai qu’on est face à un modèle qui est complexe, et comme tu dis, heureusement qu’on arrive aussi à mettre des mots, à trouver des réponses puisque nous avons aussi des… parce que peut-être en Inde ou en Orient, on a déjà compris depuis…

Caroline : Oui, oui. Non, mais ça me fait… on en revient sur le Tai-chi, et ça me fait penser aussi beaucoup aux pratiques de la médecine chinoise avec l’acupuncture, avec les massages chinois, le Tai-chi, le Qi gong. En fait, on n’explique pas forcément, mais on sait que c’est bon pour nous et on le fait quoi.

Valéria : Exactement. Et on n’a pas… Après, ce qui est intéressant, c’est de, si on veut développer sa conscience, c’est vraiment s’approprier de cela. Voilà. C’est bien un tout petit peu de s’intéresser en fait à ce changement de modèle anatomique, à sentir un petit peu, comment, dans une introspection je peux sentir le mouvement du corps. Voilà, c’est un chouette chemin de, voilà, de vie en fait.

Caroline : Et du coup, tu as eu donc différents patients, et ça m’intéresse aussi, j’aime bien poser cette question à mes invités, de savoir, voilà, d’avoir des exemples un petit peu concret. Parce que donc, on a eu la théorie, on a eu un petit peu les fonctionnalités. Et puis j’aime bien toujours illustrer par des exemples de vie quotidienne. Bon, tu nous as parlé de ton exemple personnel sur ton dos. Mais est-ce que tu as des exemples assez frappants aussi, assez marquants, de personnes qui sont venues te voir et qui ont re… enfin qui ont eu cette sensation un petit peu de revivre quoi.

Valéria : Oui bien sûr. On a… Bah j’ai eu, alors de, je peux te parler d’une paralysie faciale aussi, qui est quand même très étonnante parce que ça a duré, on a mis quand même peut-être une dizaine de séances. Et tu sais, suite à un AVC, c’était une forme virale, donc c’est une forme de grimace comme ça, qui se dessine, et qui tient, qui tient, qui tient. Et c’était assez magique, enfin, c’est plutôt magique de se dire… C’est vrai que le gain il a été progressif. Ce n’est pas en une séance que plaf le… Mais la détente et la remise en relation des connexions a fait que cette personne qui était très incrédule au début, mais je comprends, qui était de très mauvais poil, qui disait « De toute façon, ça ne va pas marcher ».

Caroline : Mais alors pourquoi elle est venue te voir ?

Valéria : Elle est venue parce que son orthophoniste lui avait conseillé.

Caroline : OK.

Valéria : Donc elle avait de la considération pour lui et voilà donc.

Caroline : OK. Non, mais c’est… non, mais c’est intéressant tu vois de savoir comment une personne se retrouve devant toi alors qu’elle-même elle n’y croit pas. Est-ce que c’était du désespoir ? Est-ce que c’était un médecin qui lui en a parlé ? Enfin donc, voilà, c’est intéressant.

Valéria : Après, souvent, oui, je peux, je peux avoir aussi des personnes qui viennent et me disent rien n’a marché, et prétendre qu’en une séance on puisse, voilà. Ça ne se fera pas en une séance. En tout cas, ça ne peut pas se mettre en place en une séance parce que ce serait absurde de le penser. Donc évidemment, ce n’est pas un miracle.

Caroline : Non.

Valéria : Mais c’est plutôt étonnant. J’ai un autre exemple que je peux te donner, qui est encore un autre exemple sur moi-même, et où j’étais moi-même mon propre cobaye. J’étais… en 2020, j’ai eu un cancer du sein. Et donc pendant le confinement, voilà, il n’y avait pas non plus, je ne pouvais pas faire de rééducation ou de… Et j’ai reçu quelques séances de… D’ailleurs, j’ai eu la chance d’être reçue par Nadine Quéré. Et ensuite, ce qui s’est passé, c’est que j’ai pu, vraiment, je me suis… J’ai eu la certitude en fait que j’allais gagner, j’allais retrouver complètement mon amplitude. Donc au niveau des chirurgies, là, j’ai eu trois chirurgies en fait sur… Et j’ai pu développer, donc j’ai développé une technique d’auto-traitement. Donc j’aide les femmes aussi qui passent par le cancer du sein à se réapproprier, déjà la prothèse ou pas la prothèse, en tout cas, réapproprier la partie du corps qui a été amputée, et à remettre du glissement au niveau de la cicatrice et à retrouver du mouvement.

Caroline : OK. Je n’avais pas conscience, tu vois, que ça enlevait du mouvement.

Valéria : Oui, parce que tu sais comme tu coupes, donc en chirurgie on coupe, et ce qui se passe c’est que les couches, quand elles cicatrisent, elles vont se coller un petit peu. Et ce qui est important c’est de justement de remettre les plans de glissement, c’est ça les fascias.

Caroline : Et c’est ça qu’il a fait Thomas sur mon épaule. Tu vois, ça connecte là-haut. OK.

Valéria : Donc c’est de remettre les plans de glissement. Et donc, c’est quand même extraordinaire de se dire que j’ai récupéré, tu vois…

Caroline : 100 %.

Valéria : À 100 %. Oui.

Caroline : OK.

Valéria : 100 %.

Caroline : Et c’était… tu avais un… Tu as eu zéro doute sur le fait que tu allais récupérer, et tu étais déterminée à t’automasser, à te le faire à toi-même pour retrouver tout ça, parce que tu savais que tu avais en toi cette possibilité de le faire.

Valéria : Bien sûr.

Caroline : OK.

Valéria : Parce qu’on a, on a des outils. Je me suis dit bon, il y a des outils que j’applique pour les autres, pour les personnes, donc comment… Et ce qui est génial c’est que les personnes que j’ai aidées, les femmes que j’aide avec ça, elles ont… elles sont, en fait, elles arrivent vraiment à avoir cette qualité, qui est aussi une, voilà, le bienfait aussi de se relier à une partie de soi-même, du féminin, une intimité avec soi, avec sa peau. Et de se dire OK, je passe par ça, mais je peux retrouver mon intégrité au niveau de la peau, parce qu’on a été coupé donc il y a des… voilà. Et c’est vraiment, je suis très contente d’avoir, voilà, d’avoir finalement eu ce cancer du sein puisque j’ai pu développer ce projet que j’ai appelé carnet_mammifère.

Caroline : OK. OK. Et quand tu m’as montré tes doigts, c’est parce que tu as développé… donc juste quand Valéria a parlé de la façon qu’elle avait eu d’approcher, enfin, je ne sais pas ta rééducation, ou comment on peut appeler ça, mais, tu m’as montré vraiment le petit coussinet du bout des doigts. C’est parce que tu utilises cette partie-là des doigts plus que d’habitude ?

Valéria : Oui, parce que là, c’est un toucher qui s’adresse à la peau.

Caroline : OK.

Valéria : Et donc du coup ça va être de la peau contre peau.

Caroline : OK.

Valéria : Et ce qui se passe, c’est que ce n’est pas un glissement comme ça, mais c’est un glissement où je vais tracter la matière. Tu vois ?

Caroline : OK. J’ai compris.

Valéria : Voilà. Tu t’accroches.

Caroline : Ouais, ouais.

Valéria : Voilà. Tu vois ? Tu t’accroches, et tu glisses avec ça. Voilà.

Caroline : OK.

Valéria : Après, tu vois, on a…

Caroline : C’est un peu, un peu si je peux me permettre de ce que je perçois, comme une chaussure qui accrocherait vraiment bien sur le sol, mais avec laquelle on arriverait quand même à un peu glisser.

Valéria : Oui, si tu veux, oui. Parce qu’il y a un point d’appui. Il y a… donc il y a une partie pour que… En fait, pour que j’amène l’intériorité du corps, il faut que… il faut… tu vois ? C’est pour ça que c’est le contraire de l’huile. On ne met pas de l’huile parce que l’huile, il va glisser par-dessus.

Caroline : Ouais, ouais.

Valéria : Ce qui est génial aussi, c’est une autre… Mais là, on veut que ça glisse dedans. Donc je dois agripper un peu la matière. Tu vois ?

Caroline : OK.

Valéria : Je dois m’y coller quoi. Tu vois ? Je m’y colle dedans.

Caroline : OK. OK, j’ai compris.

Valéria : Tu vois ? Et après, je peux travailler à distance. C’est-à-dire que je peux aller dans jusqu’à ton épaule. Tu vois ? Là en fait, comme c’est un… on a… C’est une éducation en fait. En même temps, on peut vraiment… à le sentir à distance et comment il…

Caroline : OK. C’est… Moi, je trouve ça passionnant. Ce sujet me fascine. Je ne sais pas pourquoi, mais ça me fascine les fascias. Et vraiment, je vous invite à aller regarder le reportage Arte parce qu’il est très, très bien fait. On comprend très bien. J’avais aussi une autre image, je me demande si ce n’est pas Thomas, que je remercie d’ailleurs, parce que c’est Thomas donc mon ostéopathe qui nous a mis en relation, parce qu’il travaille les fascias, qui m’avait parlé des fascias et qui pour donner une image avait parlé d’un pamplemousse je crois, ou je ne sais plus si c’était dans le reportage Arte.

Valéria : Oui, c’est dans le reportage aussi.

Caroline : Ah OK alors. Peut-être.

Valéria : Oui. C’est beau parce qu’en fait, oui, ça montre comment à l’intérieur, donc il y a une peau, et à l’intérieur, il y a toute une…

Caroline : En fait la membrane blanche du pamplemousse, à peu de choses près c’est l’image, moi pareil, quand j’en parle des fascias parce que je leur dis « Mais va voir un ostéo qui s’y connaît en fascias, vraiment ça va changer ta vie » ou voilà. Je ne connaissais même pas le métier de fasciathérapeute pour le coup. Et à chaque fois on me dit « Mais c’est quoi Caro les fascias tout ça ? », et je dis « Bah, je ne sais pas trop, trop je t’avoue expliquer, par contre je sais que c’est comme la peau du pamplemousse ». Mais je trouve que l’exemple est aussi parlant. Mais OK d’accord. OK.

Valéria : Ou la cuisse de canard aussi.

Caroline : OK. Pourquoi ?

Valéria : Parce que si tu regardes dans la cuisse, Nadine Quéré elle parle beaucoup de la cuisse de…

Caroline : De canard.

Valéria :… canard. En fait, on voit bien qu’il y a… tu as les ligaments, et que les ligaments sont liés aux muscles, que les muscles sont liés aux os. On le voit, on situe cette membrane blanche.

Caroline : OK.

Valéria : Tu arrives à la tirer, tu vas voir que c’est très, très costaud.

Caroline : OK. OK.

Valéria : C’est visible si tu…

Caroline : D’accord. Je mange du canard, mais ça fait longtemps. Mais je vais regarder la prochaine fois, je vais faire attention. Et si le sujet intéresse, comment on peut en savoir plus ? Comment on peut en apprendre plus ? Donc il y a ce livre dont je mettrai les références bien sûr. C’est quoi ? C’est des écoles maintenant de fasciathérapie ?

Valéria : On a un site très intéressant qui est le CERAP.

Caroline : OK.

Valéria : cerap.org.

Caroline : OK.

Valéria : Et en fait, c’est le laboratoire de recherche de Danis Bois.

Caroline : OK.

Valéria : Qui a vraiment regroupé les masters. Donc on a… on peut aller en… Il y a une université en pédagogie perceptive.

Caroline : OK. C’est où ?

Valéria : À Porto. Au Portugal.

Caroline : OK.

Valéria : Voilà. Et donc, le CERAP c’est vraiment un puits de savoir où tout est disponible. Donc on a beaucoup de masters, ça varie de la Pulsologie, donc c’est par exemple la fasciathérapie appliquée aux pouls sanguins, à l’expressivité en danse via Fascia, le golfe, le mal-être, enfin, on a vraiment plein, plein de possibilités, plein de masters réunis autour de…

Caroline : OK.

Valéria : Voilà, des fascias.

Caroline : OK.

Valéria : C’est très intéressant.

Caroline : Moi, le sujet me fascine, mais depuis que j’ai vu ce reportage Arte en fait. J’ai eu l’impression tu sais de comprendre plein de choses par rapport à ce qu’on vit nous. Je suis assez attentive à mon corps, et cetera et c’est vrai que je trouvais vraiment ce reportage et enfin moi, moi ça me fascine. Et est-ce que, aller, on va terminer là-dessus, est-ce que… j’aime bien voilà poser cette question à mes invités. Quelles sont toi tes petits outils ou tes petites astuces du quotidien pour rester en forme et te sentir bien.

Valéria : OK, OK. Bon, la méditation

Caroline : Nécessairement.

Valéria : Voilà, la méditation. Pas forcément vingt minutes, ça peut être même trois minutes, mais faire de qualité et c’est ce rendez-vous, voilà. Moi-même en début de journée, et en fin de journée aussi.

Caroline : OK.

Valéria : Parce que ça va me préparer la nuit. Qu’est-ce que j’ai aussi ? Tout simplement je fais du vélo. Je ne prends pas… j’essaie dans la mesure du possible de, d’être, voilà, de me balader à vélo.

Caroline : OK. OK.

Valéria : Et… Bon, nous avons de la chance, on est sur Nice donc j’essaie aussi de, dans ce tour à vélo, de faire toujours un détour pour voir la mer tous les jours.

Caroline : Et oui, mais c’est très important. Moi j’adore, c’est… Ça me détend en fait quand je vais, oui, juste cinq minutes, voir la mer ouais, ça détend énormément. OK. Trois petites astuces assez simples. Merci beaucoup ! C’était très, très intéressant. Moi le sujet j’adore franchement et j’ai hâte du coup de venir tester.

Valéria : Mais avec grand plaisir.

Caroline : Merci.

Valéria : Merci beaucoup Caroline. Merci.